La fatigue, ça commence dans la tête
Je suis claqué, vidé, épuisé, lessivé, crevé. C’est parce que je cours tout le temps. C’est la faute de l’hiver qui n’en finit pas, du manque de lumière et de vacances, des temps de transport, de mon patron, de mes enfants.
Près de la moitié des Français déclarent avoir éprouvé une « fatigue persistante » dans les six mois précédents (sondage Ipsos -“Le Quotidien du médecin”). Une personne sur cinq en moyenne se rend chez le médecin pour cause de fatigue. La fatigue, maladie du siècle ? Non et oui. Non, parce qu’on appelait jadis neurasthénie, sans plus l’expliquer, ce sentiment de lassitude et d’impuissance. Oui, parce que de nouvelles pressions sociales, liées au travail notamment, ont accentué le stress de notre quotidien. On se dit fatigué parce qu’on ne sait rien dire d’autre de ce délitement intérieur qu’on n’arrive ni à comprendre ni à juguler.
Une réaction normale à l’effort ?
La fatigue est une réaction normale à l’effort, suscitée par notre organisme pour protéger nos muscles, dont le premier d’entre eux, le cerveau. Un phénomène physiologique réversible avec le repos : si je suis fatigué, je dors ; si je dors, je récupère.
Pas si simple. Certains, malgré leur épuisement, se tournent et se retournent sans trouver le sommeil. D’autres, après une longue nuit, se réveillent avec les paupières en plomb et l’énergie d’un mollusque. C’est quand rien ne l’apaise que la fatigue devient inquiétante. Une fois qu’on a éliminé les 20 % de cas où elle est le symptôme d’une maladie non détectée ou d’une rupture momentanée de nos biorythmes, il reste cet effrayant et indicible sentiment de découragement devant des journées dont on ne voit pas la fin et une vie que l’on trouve trop lourde pour nos épaules. Là, on est dans le trouble psy.
Lutter contre la fatigue
Comment lutter contre la fatigue avant qu’elle ne devienne un symptôme de dépression ? L’un des bons moyens est de se fatiguer différemment : contre la fatigue physique, rien de tel qu’une fatigue intellectuelle, et vice-versa. Le sport sécrète des endorphines et des sérotonines, deux neurotransmetteurs qui sont en chute libre quand on se sent épuisé. Et une heure de lecture éloigne la fatigue physique.
Bien entendu, la fatigue psychologique, comme tout symptôme dépressif, peut être soulagée par des antidépresseurs ou des anxiolytiques. Lorsqu’elle est chronique, elle peut également être calmée par une thérapie comportementale.
Dans un premier temps, on apprend à ne plus avoir peur de la sensation de fatigue. Puis on en analyse les significations profondes : lassitude, ennui, désintérêt, stress ? Ensuite, on travaille le ressenti : cette culpabilité à l’idée de se détendre, si bien inculquée par nos parents : « Tu es sûr que tu n’as vraiment rien à faire ? » ; nos craintes hypocondriaques : « Je suis fatigué, je dois couver un cancer » ; l’agressivité contre nous-même : « Je n’y arrive pas, je suis vraiment nul »… Après cette recherche consciente et inconsciente, on saura peut-être faire des choix, réduire nos activités superflues, nous réconcilier avec le repos. Bref, réapprendre à vivre.
“Yuppies Syndrom” : Quand la fatigue handicape gravement
Cent cinquante mille Français, dont 80 % de femmes, souffrent de SFC (syndrome de fatigue chronique). Découverte en 1988 par les Américains, et baptisée “Yuppies Syndrom”, cette maladie reste méconnue. Elle se manifeste par un épuisement “sévère et continu” qu’aucun repos ne vient apaiser, qui dure plus de six mois et conduit le malade à abandonner toutes ses activités. Les causes de ce syndrome restent totalement inconnues. Les scientifiques ont avancé l’idée d’une origine virale qui priverait le malade de phases de sommeil lent et profond, celles au cours desquelles le corps régénère son énergie.
Aucun traitement n’a encore été mis au point.
Renseignements sur le site Association française de fatigue chronique : http://www.asso-sfc.org/