Quand l’anxiété devient une maladie
L’anxiété est une sensation normale. Elle est présente chez tous les êtres humains. Selon les circonstances elle
peut revêtir des formes différentes, de la simple inquiétude à l’angoisse et même à la terreur. Parfois, elle se manifeste de façon anormale et devient une maladie à part entière. Phobies,
panique, troubles obsessionnels compulsifs : apprenez à reconnaître les différentes formes d’anxiété pathologique.
L’anxiété a un rôle utile dans notre vie : c’est parce que nous nous inquiétons de la sécurité de nos enfants que
nous les surveillons attentivement, c’est parce que nous pensons à notre propre sécurité que nous évitons de prendre des risques inconsidérés, c’est parce que nous avons peur que nous fuyons
lorsque c’est nécessaire devant des dangers que nous ne pouvons affronter : un incendie, un malfaiteur armé par exemple.
Cette anxiété survient à la suite d’évènements clairement identifiables, nous aide à y faire face et disparaît en
même temps que sa cause.
Mais il arrive chez certaines personnes que l’anxiété se manifeste de façon anormale : soit parce qu’elle survient
sans raison, soit parce que son intensité et les réponses qu’elle entraîne sont sans commune mesure avec l’événement déclenchant. On parle alors d’anxiété pathologique.
Cette anxiété pathologique peut revêtir de multiples aspects parmi lesquels on a coutume de distinguer
schématiquement cinq grands tableaux principaux :
- L’anxiété généralisée ;
- Les phobies ;
- Les troubles obsessionnels-compulsifs ;
- La crise de panique ;
- Le stress post-traumatique.
Ces tableaux sont assez fréquents puisqu’on estime que 3 à 5 % de la population a présenté l’un d’eux à un moment ou
un autre de sa vie.
Des causes
multiples
Les causes de l’anxiété pathologique sont mal connues. Il est clair que certaines personnes sont plus sujettes à
l’anxiété que la moyenne. On sait aussi que des facteurs sociaux jouent un rôle important : des parents hyperanxieux ont tendance à transmettre leurs propres inquiétudes à leurs enfants. Des
familles où les enfants sont délaissés, voire violentés sont évidemment pourvoyeuses de troubles anxieux. Des traumatismes psychologiques de l’enfance ou de l’âge adulte sont souvent un événement
déclenchant. Certaines maladies s’accompagnent régulièrement d’anxiété : hypoglycémie, hyperthyroïdie, certaines insuffisances cardiaques, certains déficits en vitamines. Les périodes de sevrage
(alcool, tabac…) ont le même effet.
Enfin les femmes sont environ deux fois plus nombreuses que les hommes à faire des épisodes d’anxiété pathologique,
sans que l’on sache pourquoi.
Phobies, TOC, crises de panique…
On distingue plusieurs types d’anxiété pathologique, dont les manifestations varient.
Le syndrome d’anxiété généralisée
Il se manifeste par un état de tension, d’inquiétude permanent sans aucun événement extérieur qui l’explique. Les
personnes qui en souffrent s’inquiètent de tout en permanence. Elles n’arrivent pas à se relaxer, peinent souvent à s’endormir, sont irritables, impatientes, ont des difficultés de
concentration.
Ces sensations s’accompagnent souvent de troubles physiques : transpiration excessive, douleurs d’estomac, diarrhée,
besoins fréquents d’uriner, mains froides, bouche sèche, vertiges, maux de tête… Cette pathologie est handicapante car elle entraîne des difficultés permanentes dans la vie quotidienne, aussi
bien au travail où elle rend les relations difficiles que dans la vie privée qui se restreint peu à peu. On estime qu’environ 3% de la population est confrontée à ce trouble.
Les phobies
Dans ce cas l’anxiété n’est plus permanente et générale, mais elle se cristallise sur des situations particulières
qui la font survenir. Le sujet ne ressent pas d’inquiétude particulière dans son quotidien, mais l’angoisse surgit dès qu’il est confronté à la situation qui déclenche la phobie. L’avantage est
que l’angoisse est évitable facilement : il suffit d’éviter la situation qui la crée. L’inconvénient est que de nombreuses phobies correspondent à des situations que l’on rencontre souvent tout
au long de sa vie et qu’elles peuvent de ce fait devenir très invalidantes. La peur des serpents dans notre monde moderne n’est pas très grave et ne gâche pas la vie de ceux qui l’éprouvent. Mais
d’autres phobies sont beaucoup plus délicates à gérer. Les plus fréquentes sont : l’agoraphobie, peur des lieux publics et de la foule ; la claustrophobie : peur des endroits clos, ascenseurs,
avions, chambres fermées par exemple ; les zoophobies : peur de certains animaux, souris, chiens, chats notamment.
On distingue deux grandes sortes de phobies : d’une part les phobies sociales, peur de situations dans lesquelles on
est confronté aux relations avec les autres (crainte de parler en public, crainte exagérée de ses supérieurs, timidité anormale dans ses relations personnelles…) et d’autre part les phobies
d’objets ou de situation qui n’impliquent pas les relations sociales (claustrophobie, peur des animaux…).
Les troubles obsessionnels-compulsifs
Dans ce cas l’anxiété n’est pas le signe le plus évident, elle est sous-jacente. L’obsession conduit le sujet qui en
est victime à ressentir en permanence des pensées qui se répètent à l’identique, à éprouver le besoin de refaire sans cesse les mêmes gestes comme en une sorte de rituel. Certaines personnes se
lavent ainsi les mains des dizaines de fois dans la journée, d’autres sont obligées de suivre toujours un itinéraire identique et compliqué pour aller d’un lieu à un autre, d’autres encore ne
peuvent accomplir aucune action sans la faire précéder de rituels compliqués et incompréhensibles pour l’entourage. On comprend à quel point cette pathologie peut entraver la vie quotidienne.
Elle s’accompagne en général de traits de caractère particuliers : obsession de l’ordre, avarice, propreté excessive par peur des germes…
Ce trouble, qui commence souvent dans l’enfance ou à l’adolescence, touche environ 2 % de la population.
La crise de panique
Sa description est assez facile à comprendre car tout le monde ou presque a ressenti un jour ou l’autre une crise de
panique devant un événement terrifiant. Mais ici ces crises se renouvellent fréquemment et sans cause déclenchante. Peu à peu le tableau s’aggrave car la personne qui est sujette à ce trouble va
être obsédée par la crainte de voir la crise revenir, puisqu’elle peut se produire à tout moment. Tous les signes psychiques et physiques de l’anxiété sont alors présents sous une forme
exacerbée, entraînant un malaise majeur, une sensation d’oppression insupportable qui donne parfois l’impression que l’on va mourir ou devenir fou.
Le syndrome de stress post-traumatique
Il fait suite à un événement particulièrement angoissant ayant entraîné un traumatisme psychique important :
catastrophe, agression, perte d’un être très aimé… Sur le moment le sujet réagit par un tableau de stress aigu : forte angoisse, désespoir ou au contraire impossibilité de toute
réaction.
Par la suite, le souvenir de l’événement va hanter celui qui l’a vécu. Ce souvenir va se manifester sous forme de
cauchemars parfois quotidiens, pouvant entraîner une insomnie sévère par crainte de l’endormissement. Les images peuvent aussi survenir inopinément dans la journée, empêchant la concentration sur
ce que l’on a à faire, entraînant irritabilité, fuite des contacts sociaux, hyperexcitabilité au moindre stimulus, perte de confiance en soi, évitement de situations ou de personnes qui
rappellent l’événement traumatisant.
Ce syndrome se rencontre souvent chez des soldats au cours des guerres, mais aussi chez des enfants victimes de
violences ou d’abus sexuels.
Des traitements parfois très longs
Les traitements détaillés de chaque forme d’anxiété pathologique varient. Ils sont établis en fonction d’une part de
la nature du trouble (phobie, obsession, panique…), d’autre part de la personnalité du sujet qui en souffre. Les psychothérapies (comportementales, d’inspiration analytique, etc…) y tiennent une
place importante. Dans certains cas on y associe des traitements médicamenteux (anxiolytiques, antidépresseurs).
Une grande partie des anxiétés pathologiques sont curables, d’autres sont susceptibles d’améliorations considérables
qui permettent en général aux patients de reprendre une vie quotidienne quasi-normale. Mais la durée du traitement est extrêmement variable, de quelques semaines à plusieurs années.
Dr Christian Duchène